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Bastien Falluel

Franchement, qui a besoin d’un smoking ?

Bastien Falluel


De toute évidence, pas moi. Et sûrement pas vous. Pourtant, je suis sûr que vous rêvez de pouvoir en porter un, un jour. Vous n’y avez jamais réfléchi, vous ne l’avez jamais envisagé mais vous en avez secrètement envie.



C’est tout à fait compréhensible, nous avons toute notre vie été bercés d’images mythiques et romantiques pleines de nœuds papillons noirs et de cols châles. Est-ce vraiment le smoking en lui-même qui nous donne cette impression de distinction suprême? Après tout, c’est assez simple un smoking. Costume noir, col satiné, chemise blanche, chaussures noire vernies et nœud papillon. C’est justement par sa discrétion qu’il tire son existence, n’est-ce pas ? L’idée est de laisser les robes de soirée de nos femmes resplendir comme il se doit.


Alors, ce doit être ce qu’il représente bien sûr. L’imaginaire collectif nous dit que l’homme en smoking est riche, élégant et gentleman. Le cinéma nous raconte qu’il est fort et que les femmes sont folles de lui. C’est tout moi ça.


Synonyme de glamour absolu, le port du smoking doit bien être le fantasme le plus répandu chez les hommes, et sûrement chez quelques femmes.

Certains d’entre vous ont peut-être assouvi ce fantasme d’ailleurs. Et depuis, vous ne pensez qu’à la prochaine occasion de réitérer l’expérience, chanceux que vous êtes ! 

Et oui, il en faut de la chance parce qu’après tout, au-delà du besoin, encore faut-il avoir une véritable occasion de le porter ce smoking.  C’est d’ailleurs de là que vient tout son paradoxe.


Je m’explique.

 

Quel que soit votre style – classique, sportif, BCBG, streetwear, workwear, quiet luxury, old money, et autres étiquettes à se coller sur le front – le smoking fait l’unanimité en tant que tenue la plus élégante qui soit. Pourtant, très peu de gens en possèdent. Paradoxe.


La raison est évidente : nous n’avons pas l’occasion d’en porter. Et logiquement, nous n’allons pas investir dans une pièce, objet de fantasmes, certes, mais d’une décevante inutilité.

 

Et bien, contre toute logique, je l’ai fait. J’ai acheté un smoking spécialement pour d’hypothétiques soirées ou s‘entremêleraient petits fours, champagne et robes de soirée. 

Et je les attends toujours ces soirées. J’ai d‘ailleurs exhorté Sasha, notre rédac’ en chef, de me trouver ou organiser des soirées pour rentabiliser mon achat. 


Rassurez-vous, mon portefeuille n’a (presque) rien senti. Ce smoking sera vite rentabilisé. Pourquoi ? Parce que je ne suis pas allé l’acheter à 548 € chez SuitSupply (raisonnable dans l’absolu). 

C’est sur mon terrain de jeu favori que j’ai trouvé mon bonheur : Vinted. 


Revenons un peu à la genèse de ce projet. La première fois que j’ai envisagé l’achat d’un smoking, c’était il y a trois ans, lorsque l’entreprise dans laquelle je travaillais alors avait organisé une soirée « casino ». Je me suis dit que j’allais sortir du lot en portant un magnifique smoking à col châle. Attention, parti pris : mon smoking serait forcément un col châle, celui-ci ne pouvant décemment se trouver que sur un smoking, à la différence des revers en pointe que nous pouvons trouver dans un costume « classique ». 


Je me suis alors lancé à la recherche d’un smoking, en seconde main naturellement, puisque je ne voulais pas investir beaucoup d’argent. 

Petit aparté, vous comprendrez que je suis un fervent supporter de l’achat de seconde main. Pour plein de bonnes raisons. C’est bon pour le porte-monnaie, c’est bon pour la planète, et bon pour le style, la plupart du temps tout du moins. Cela demande un peu de temps, mais de très jolies affaires peuvent être réalisées. 


Revenons à nos moutons. Mes recherches m’ont rapidement conduit à mettre une vingtaine de smokings dans mes favoris, tous à moins de 100€. Il y a donc matière à s’amuser, même si à ces prix, les grandes marques italiennes que j’affectionne n’y étaient pas forcément.

Malheureusement, la soirée casino ayant été annulée, je n’ai pas transformé l’essai à ce moment-là. 


Non, j’attendais une véritable occasion et c’est il y a seulement quelques semaines que j’achète finalement mon premier smoking : sur mesure, d’un tailleur espagnol de la ville de Saragosse, date de conception 1981. Je trouve même le nom du propriétaire sur l’étiquette. Les vêtements ont toujours suscité mon intérêt, et l’histoire qu’ils racontent me fascine encore plus. 


Prix d’achat : 18€. 


Evidemment, passage obligatoire chez Ousmane, mon retoucheur de la rue Godot de Moroy : cintrage, fuselage, changement des boutons, création d’un double bouton : 100€. 


Lorsque je suis venu récupérer le smoking, Ousmane m’a indiqué avec un enthousiasme non retenu que ce costume avait été entièrement cousu à la main, sans machine, au fil blanc, les points à un demi-centimètre d’écart, et qu’il avait adoré suivre la même méthode pour faire les retouches afin de ne pas dénaturer le travail d’origine. C’est à ce genre de détail que l’on mesure le talent et la valeur de nos précieux artisans. 


N’oublions pas bien sûr la chemise. Au choix, col classique ou cassé, de préférence à plastron. J’ai opté pour le col cassé, par opportunité et parce que je n’avais pas peur d’en faire trop. 

Avec ceci, des mocassins vernis très classiques. 


J’ai même trouvé un joli Cummerbund, cette fameuse ceinture de smoking épaisse en soie avec des plis. Il ne me manque que le nœud papillon, qui doit être nouable sous peine de finir au bûcher. Ne supportant que très peu le feu sur ma peau, je me dois d’en trouver un rapidement. 


Je suis donc aujourd’hui l’heureux détenteur d’un smoking que je n’ai toujours pas, à l’heure actuelle, eu l’occasion de porter, mais cela ne saurait tarder. Et quand ce moment arrivera, je pourrais alors me prendre un peu pour quelqu’un d’autre le temps d’une soirée…



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